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Article mis à jour le 9 mars 2023

Comment parvenir à une paix juste et durable en Colombie ?

par Solsoc publié le 29 mai 2023

En Colombie, un changement politique important s’est produit en 2022 : le premier gouvernement de gauche de l’histoire du pays est entré en fonction le 7 août, emmené par Gustavo Petro. Ce pays, construit sur des injustices fondamentales, connaît un conflit armé et une violence politique énorme. À présent, les citoyen∙ne∙s et les partis progressistes veulent avancer vers la paix et la justice sociale. Focus sur quelques enjeux liés aux femmes.

Une volonté politique, enfin !

En 2016, après 60 ans de conflit armé, les FARCs (Les Forces armées révolutionnaires de Colombie — Armée du Peuple; créés en 1964, les FARCs étaient la principale guérilla communiste en Colombie) signent un accord de paix avec le gouvernement de Juan Manuel Santos. Cet accord historique devait mettre fin à des décennies de conflits ayant fait plus de 45 000 morts et plusieurs millions de déplacé·e·s.

Mais son successeur, Ivan Duque n’a fait aucun effort pour le mettre en oeuvre. Les ex-FARCs ont été parqué·e·s dans des camps de « réinsertion » avec des conditions de vie précaires. Pour les ex-combattant·e·s qui ont généralement peu étudié, peu d’opportunités existent pour retrouver une vie normale. Le gouvernement de Petro a donc du pain sur la planche pour avancer vers la « paix totale ». D’autant plus que la Colombie compte encore une cinquantaine de guérillas, paramilitaires et groupes criminels.

Le rapport de la Commission de la Vérité [1], qui répertorie 456 200 violations des droits humains durant le conflit armé, établit que ce sont les femmes et les paysan∙ne∙s afrodescendant∙e∙s qui ont été les plus durement touchées. Le rapport recommande dès lors que le pays démantèle le racisme, le patriarcat et la misogynie. En 6 ans, seules 13 % des dispositions concernant les aspects de genre ont été mises en oeuvre.

Restituer et redistribuer les terres

Une des causes structurelles du conflit armé est l’injustice liée à la concentration des terres. Pire, le sénateur Ariel Ávila explique « ceux qui ont gagné la guerre sont les élites rurales latifundistes qui se sont retrouvées avec 6 millions d’hectares de terres spoliées aux petits paysans ». Pour rétablir la justice, deux processus sont à mener de front. D’une part, l’État devra acheter et mettre des terres à disposition de familles paysannes qui n’en ont pas. Les femmes cheffes de ménages seront priorisées, car le déséquilibre est flagrant, les femmes détenant seulement 11 % des terres du pays.

D’autre part, les terres qui ont été spoliées devront être restituées. Ces procédures de restitution sont longues et font peser un risque énorme aux réclamants de terre. Les habitant∙e∙s de La Teca à Turbó, dans la région d’Urabá, racontent la peur au ventre et la voix basse comment les narcoparamilitaires du coin les ont forcé∙e∙s à vendre leurs terres, à un prix dérisoire, à une entreprise bananière. Certain∙e∙s membres de la communauté ont été tué∙e∙s et d’autres continuent d’être menacé∙e∙s. Au bout du village, on comprend mieux lorsque l’on découvre un port privé d’où partent les caisses de bananes, parfois agrémentées de cocaïne, direction Anvers.

Les grandes entreprises, le premier pouvoir ?

La Colombie symbolise parfaitement le capitalisme sauvage. Les entreprises agroalimentaires pratiquent les monocultures intensives, détruisant l’environnement et exploitant les travailleuses∙eurs. Les syndicalistes du secteur témoignent : dans des métiers proches de l’esclavage, l’accès aux soins et à la Sécurité sociale est nul et la contestation est réprimée par des renvois, des menaces et des meurtres.

Les gouvernements précédents ont favorisé l’arrivée de multinationales minières comme Anglogold Ashanti, au mépris des communautés paysannes, indigènes et afrocolombiennes présentes dans les zones. Les désastres environnementaux se multiplient. Petro entend freiner les projets miniers et établir des relations commerciales plus saines en révisant les traités de libre-échange. Il n’aura pas que des amis.

Que faire en Belgique ?

Il y a encore de nombreux défis pour avancer vers plus de justice sociale en Colombie. Combattre la pauvreté, l’impunité, donner des perspectives d’éducation et d’emploi à la jeunesse, lutter contre le racisme, le patriarcat et les violences faites aux femmes. Luz Munera, députée, affirme « parler de paix totale sans changer les conditions de vie des Colombien∙ne∙s est un mensonge ». En Colombie, Solsoc, FOS, IFSI et leurs partenaires la FGTB HORVAL et la Centrale Générale soutiennent des organisations syndicales et paysannes, les processus de paix, de protection des défenseuses∙eurs des droits humains. En Belgique, ces organisations relaient ces préoccupations auprès des citoyen∙ne∙s et mandataires politiques. Aujourd’hui, exiger de nos entreprises qu’elles respectent les droits humains et les droits environnementaux apparaît comme une évidence. C’est pourquoi nous continuerons à faire pression pour que la Belgique se dote d’une loi ambitieuse sur le devoir de vigilance des entreprises.

[1] Les commissions vérité ont été définies comme « des organes officiels, temporaires et non judiciaires chargés d’établir les faits, qui enquêtent sur un ensemble d’atteintes aux droits de l’homme ou au droit humanitaire généralement commis au cours d’un certain nombre d’années. » Pour en savoir plus : https://bit.ly/3GO60pT.

Pour aller plus loin :Découvrez les ations de Solsoc sur le devoir de vigilance des entreprise
Tags : paix - durable - durabilité - Colombie - solsoc