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Société

La santé mentale au féminin

Trigger Warning: Anorexie
Article mis à jour le 20 mars 2017

Anorexie mentale : pourquoi les filles sont-elles plus concernées ?

par Céline Orban publié le 8 mars 2017 ©Florent Marloye pour Femmes Plurielles

S’il est un sujet où les troubles mentaux s’immiscent de plus en plus, c’est dans celui de l’alimentation. Pour les orthorexiques , manger sainement devient une obsession ; pour les hyperphages, manger devient compulsif et pour les anorexiques, manger devient presque impossible.

L'anorexie mentale, qu'est-ce que c'est?

« L’anorexie touche dans 9 cas sur 10 les femmes et commence généralement au milieu ou à la fin de l'adolescence : de 14 à 18 ans ».

L’anorexie mentale a été définie par le «  Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux  » comme étant un trouble des conduites alimentaires, encore appelé «  TCA  ». Dans ce type de troubles, le comportement alimentaire est gravement perturbé. Une personne anorexique présente un poids très bas, est obnubilée par celui-ci et se trouve «  grosse  » malgré une maigreur indéniable. Souvent, elle n’a plus de règles, même si celles-ci peuvent être rendues « artificielles » par l’usage d’un contraceptif. L’anorexie touche dans 9 cas sur 10 les femmes et commence généralement au milieu ou à la fin de l’adolescence : de 14 à 18 ans.

Une maladie qui touche plus les femmes

L’enquête HBSC , pour « Health Behaviour in School-Aged Children » ou « Comportements de santé des enfants en âge d’aller à l’école », montre que les filles sont plus nombreuses que les garçons à se trouver un peu ou beaucoup trop grosses et cet écart s’accentue avec l’âge. Nous pouvons le voir sur le schéma ci-dessous qui représente l’image de soi des jeunes par genre (« G » pour les garçons, « F » pour les filles) et par âge.

© Service d’Information Promotion Éducation Santé (SIPES) (Service d’Information Promotion Éducation Santé (SIPES))

Cette enquête nous apprend également que la pratique d’un régime amincissant est deux fois plus fréquente parmi les filles que les garçons.

Quand les médias s'en mêlent (et s'emmêlent)

« Les images auxquelles nous nous identifions ne correspondent pas à la réalité. Celles-ci sont d’autant plus trompeuses que 99 % des photos des magazines sont retouchées ».

Si les filles sont plus concernées que les garçons par ce trouble, c’est notamment à cause des médias. Une étude réalisée dans les iles Fidji au moment de l’arrivée de la télévision par satellite en 1995 a notamment démontré qu’avant 1995 (avant l’arrivée de la télévision donc), les régimes étaient pratiquement inexistants et les Fidjiens valorisaient les rondeurs. En 1998, 74 % des jeunes filles se trouvaient trop grosses et 62 % étaient au régime. Force est de reconnaître l’influence de la télévision (dans ce cas) sur les filles et sur la perception de leur corps. Il a été démontré que dans les séries télévisées, 33 % des actrices étaient maigres. Dans la réalité, 2 % des femmes le sont. Cela signifie que les images auxquelles nous nous identifions ne correspondent pas à la réalité. Celles-ci sont d’autant plus trompeuses que 99 % des photos des magazines sont retouchées. Et pour nous faire croire que les filles représentent une certaine normalité, elles sont amincies, mais les traces de maigreur (os saillants par exemple) sont effacées.

Par ailleurs, les magazines associeraient la minceur à la santé. Pour nous en convaincre, nous avons mené une recherche rapide dans Google Images à partir des termes « magazine santé juillet 2016 ». Voici ce que nous avons obtenu :

Cliquez sur l'image pour agrandir

Les onze couvertures illustrent des femmes. Les thèmes « corps » « alimentation » sont présents sur chacune d’entre elles. Sur les onze couvertures, six consacrent leur titre principal au thème « minceur/régime » !

Nous savons cependant que les régimes ont des conséquences désastreuses : perte de la masse musculaire et du capital osseux, instabilité de l’humeur et souvent, reprise de poids. Ces kilos repris diminuent encore davantage l’estime qu’ont les jeunes filles d’elle-même et de leur corps. Elles recommencent donc un régime et ainsi de suite.

Minceur comme synonyme de succès

« C’est toute une « idéologie valorisatrice » qui entoure la minceur. Ne félicite-ton pas quelqu’un qui a perdu quelques kilos ? »

La minceur est aussi régulièrement présentée comme gage de réussite, de succès professionnel et de contrôle de soi ; tandis que l’obésité serait considérée comme un manque de volonté et de la passivité. C’est toute une « idéologie valorisatrice » qui entoure la minceur. Ne félicite-ton pas quelqu’un qui a perdu quelques kilos ? La société pousse à la minceur et la valorise même. Les filles se comparent aux images proposées dans les médias et développent, de facto, une insatisfaction envers leur propre corps. Une jeune fille insatisfaite de son corps commence un régime et la spirale infernale peut s’enclencher. En effet, les troubles alimentaires, dont, l’anorexie, commencent souvent par un simple régime !

Quels leviers d'action ?

C’est donc sur les images qui nous sont données à voir qu’il faut agir. En France, en décembre 2015, une loi contre la maigreur excessive des mannequins a été votée. Elles devront disposer d’un certificat médical attestant de leur bon état de santé (évalué par l’IMC) pour pouvoir défiler. Aussi, les photographies de mannequins dont l’apparence corporelle a été modifiée (afin d’affiner ou d’épaissir leur silhouette) devront être accompagnées de la mention « photographie retouchée ». Voilà qui pourrait peut-être inspirer nos législateurs…

Pour aller plus loin :Analyse sur l'influence des médias sur l'anorexie Tags : inégalité - santé - stéréotypes - Médias