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Culture

La santé mentale au féminin

Article mis à jour le 25 février 2020

BD – Une case en moins

par Antigone Aristidou publié le 8 mars 2017 ©Ellen Forney (son site)« Cette « folie » qui officiellement l'habite ne pourrait-elle pas lui donner un peu de ce souffle génial qu'ont les grands artistes et sans lequel, semble-t-il, leur art ne serait rien ? »

L’image de l’artiste maudit, torturé, puisant l’inspiration dans les tourments de son âme mélancolique est un stéréotype qui nous est bien familier. Il semblerait même que les artistes soient surreprésentés parmi les personnes souffrant de troubles psychiques. A croire qu’il existe un lien direct entre troubles mentaux et génie créatif. En tout cas, c’est ce qu’entreprend de comprendre Ellen quand, au tournant de la trentaine,elle est diagnostiquée bipolaire. Ce n’est certes pas une si bonne nouvelle mais cette « folie » qui officiellement l’habite ne pourrait-elle pas lui donner un peu de ce souffle génial qu’ont les grands artistes et sans lequel, semble-t-il, leur art ne serait rien ?

©Ellen Forney (son site)

Cette question est le fil rouge de cette longue lutte qu’Ellen Forney livre avec sa maladie. Depuis le diagnostic jusqu’à la stabilisation de son état au bout de quatre années éprouvantes, l’autrice nous livre avec Une Case en Moins une autobiographie sincère et puissante. C’est le vécu de sa dépression qu’elle nous raconte de manière intense, associant une description impressionnante des états psychiques induits par sa maladie, une documentation fouillée et claire et une bonne dose d’humour et d’autodérision.

Le dessin utilise de multiples styles allant du croquis ultra-épuré à des reproductions réalistes de photos et les techniques de narration très variées, alternant des rythmes joyeux et trépidants, des croquis d’une noirceur désespérante, des cases bien ordonnées, des schémas explicatifs drôles et didactiques… La forme est en osmose parfaite avec la complexité du sujet.

A travers ce récit nous sommes amenés à mieux comprendre ce que signifie souffrir de trouble bipolaire, de la nécessité d’être entourée d’êtres compréhensifs et bienveillants, de l’effort personnel constant et persévérant, de la difficulté de trouver le traitement adapté. Car Ellen va devoir accepter la nécessité de la médication et prendre une part active dans la recherche de son équilibre.

En tant qu’artiste, elle doit aussi faire face à cette inquiétude qui la taraude : quel est le lien entre la créativité et les troubles psychiques et comment son art va-t-il être affecté par les traitements, par la recherche d’une paix intérieure? C’est une sorte de parcours initiatique qu’elle effectue à travers cette alternance d’échecs et de victoires, une longue descente aux enfers, une lente remontée en surface, un équilibre enfin trouvé, précieux et fragile, dont il faut prendre soin en permanence.

©Ellen Forney (son site)Une autre BD traitant du même sujetGoupil ou Face

Cette BD à reçu de multiples prix lors de sa sortie en 2012, notamment celui de l’association Nationale (étasunienne) pour l’avancement de la psychanalyse. Encore une démonstration en force du potentiel de transmission que recèle l’art de la Bande Dessinée.

Une case en moins – Ellen Forney – Editions Delcourt pour la traduction en français – Sortie 2012

Tags : santé - Critique - BD