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Interruption volontaire de grossesse : l’hypocrisie de la loi

par Eloïse Malcourant publié le 15 avril 2019

En 1995, la 4e Conférence internationale sur les droits des femmes à Pékin reconnaît que «les droits fondamentaux des femmes comprennent le droit d’être maîtresses de leur sexualité, y compris leur santé en matière de sexualité et de procréation, sans aucune contrainte, discrimination ou violence ». Pour ce faire, il est primordial qu’elles aient accès à l’information et à des services de qualité tout au long de leur vie en matière de santé sexuelle et reproductive, dont l’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG). En Belgique, depuis 2003, la sécurité sociale permet la prise en charge de la quasi-totalité des frais liés à l’IVG. Mais, malgré cela, le combat pour un réel droit à l’IVG est loin d’être gagné…

L’assurance obligatoire gérée par l’Institut National d’Assurance Maladie Invalidité (INAMI) considère plusieurs aspects de la vie sexuelle et reproductive des femmes. La sécurité sociale permet, entre autres, une intervention en matière de consultations gynécologiques et de contraception. Elle verse des indemnités en cas de congé de maternité et intervient en cas de grossesse non désirée (si vous êtes en ordre de paiement de vos cotisations, la mutualité rembourse la quasi-totalité des frais liés à l’IVG. Il ne vous restera que 3, 60 à payer pour les frais d’analyse). Malgré une bonne prise en charge de l’IVG par la sécurité sociale, les décisions politiques pour améliorer son accès manquent à l’appel.

L’IVG, un enjeu de santé publique

Le 15 octobre 2018, la Belgique a adopté une nouvelle loi en matière d’IVG qui a été déposée par la majorité gouvernementale en juillet 2018. L’hypocrisie et le manque d’avancées de celle-ci ont été déplorés par de nombreuses associations, notamment du monde laïque et féministe. En effet, ce texte sort l’IVG du Code pénal, mais maintient des sanctions identiques à la loi de 1990 en cas de non-respect des conditions, tant à l’égard des femmes que des médecins (emprisonnement allant de 1 à 3 mois à 1 an et amende allant jusqu’à 3400 euros).

Ce maintien des sanctions n’encourage aucunement la sortie d’un schéma de culpabilisation des femmes qui souhaitent exercer leur droit à interrompre leur grossesse sans pression sociale ni stigmatisation. Outre le maintien des sanctions pénales, cette nouvelle législation conserve le délai légal de 12 semaines durant lequel il est autorisé d’interrompre une grossesse en Belgique. Cela signifie que la Belgique continuera, chaque année, à envoyer entre 500 et 1000 femmes qui ont dépassé ce délai vers les Pays-Bas ou l’Angleterre où les délais légaux sont respectivement de 22 et de 24 semaines. Dans ces cas particuliers, la sécurité sociale belge n’intervient pas. Outre les frais du voyage, les frais de l’intervention sont à charge des patientes.

C’est pourquoi, afin d’améliorer l’accès à l’IVG en Belgique, de nombreuses associations plaident pour un allongement du délai légal au cours duquel une IVG peut être pratiquée. Enfin, afin de garantir l’accès à l’IVG en Belgique, il apparaît primordial d’accorder une attention particulière à la lutte contre la pénurie de médecins pratiquant l’interruption volontaire de grossesse. Cela passe par la valorisation du travail des médecins en centre de planning familial auprès des étudiante-s en médecine. À l’heure actuelle, rares sont les universités en Fédération Wallonie-Bruxelles qui proposent une formation (toujours sur base volontaire) aux techniques d’avortement. Seule l’Université Libre de Bruxelles en collaboration avec GACEPHA propose une formation facultative aux techniques d’avortement aux étudiant-e-s en médecine. 

C’est pourquoi, selon la Fédération des Centres de Planning Familial des FPS, l’inscription des techniques d’avortement dans le cursus d’enseignement en faculté de médecine de toutes les universités de la Fédération Wallonie-Bruxelles doit être envisagée afin que la loi puisse être appliquée dans l’intérêt de toutes les femmes, où qu’elles se trouvent sur le territoire national.