Société
Femmes et espace public
L’espace public est-il family friendly ?
par Laudine Lahaye publié le 11 juin 2019
Être parent s’avère parfois stressant. Comme lorsque le petit dernier s’agite devant le guichet de l’administration communale et qu’il est temps d’aller chercher l’aînée à la garderie. Ou que les automobilistes roulent vite devant l’école et que les trottoirs pour s’y rendre ne permettent pas le passage d’une poussette. Face à ces difficultés diverses, tant de mesures sont possibles pour rendre l’espace public family friendly, c’est-à-dire plus agréable et adapté aux besoins des familles !
L’espace public et les services collectifs ne sont pas pensés en fonction des familles mais par et pour des adultes autonomes, en pleine possession de leurs moyens. La notion de « corps agrandi » montre bien les limites de cette organisation de la collectivité. Ainsi, se déplacer avec des enfants, pendant la grossesse ou après, implique de gérer à la fois son corps et celui des enfants. Dans ce cas, la hauteur des marches pour entrer dans le train ou la largeur des sièges dans le bus complexifient les déplacements en famille.
Un petit pas pour les familles... Un grand pas pour l'humanité !
Les difficultés de mobilité soulignent l’inadaptation de l’espace public à la réalité des familles. Pour la Ligue des familles, association de soutien à la parentalité : « Les parents circulent souvent chargés : avec une poussette, un cartable, une draisienne, un sac avec le nécessaire pour les enfants… C’est donc une mobilité entravée, semblable à celle des personnes à mobilité réduite, surtout lorsque les enfants sont jeunes ». Améliorer l’espace et les services publics en matière de mobilité représente un enjeu de collectivité fondamental. Ce serait profitable à toute personne dont les déplacements sont entravés par l’âge, la taille, un handicap ou l’encombrement d’un objet. De manière générale, cela diminuerait le stress engendré par les déplacements.
La mobilité n’est pas le seul aspect sur lequel travailler pour rendre l’espace public plus accueillant envers les familles. La création d’espaces verts et de plaines de jeux, des trottoirs larges et bas, des pistes cyclables en suffisance ainsi que la sécurisation des abords des écoles contribuent à rendre les villes kids friendly. L’élargissement des horaires d’accès aux piscines, bibliothèques et ludothèques communales constitue également une piste à envisager.
Charge mentale... Aussi dans la mobilité
L’utilisation de l’espace public par les familles n’échappe pas à la répartition genrée des rôles. Les statistiques montrent clairement que les mères passent plus de temps que les pères à se déplacer pour les enfants. Selon une enquête Touring de 2009, parmi les enfants emmenés à l’école en voiture, 70 % l’étaient par leur mère contre 16 % par leur père. La charge mentale liée à la coordination, l’anticipation et l’organisation repose essentiellement sur les mères. Dès lors, outre la nécessité d’établir l’égalité entre femmes et hommes au niveau du care, il convient d’aménager l’espace public pour favoriser tant la mobilité des mères que celle des pères. Comme la Ligue des familles le suggère, les parents devraient être inclus dans les espaces de décision quant à l’élaboration notamment des plans de transports, de la grille tarifaire et horaire ainsi que de l’aménagement du territoire.
Il est temps d’y réfléchir !
Chaque commune devrait instaurer un « Bureau des temps » afin de réfléchir à l’articulation des différentes temporalités du quotidien. Les horaires d’ouverture de l’administration communale permettent-ils, par exemple, aux personnes en formation d’y accéder en journée ? Les horaires des transports en commun sont-ils accordés aux plannings des offres culturelles ? Les heures de travail, parfois décalées ou irrégulières, peuvent complexifier l’organisation familiale. Pour les FPS, les horaires des milieux d’accueil doivent être pensés en cohérence avec les exigences du monde du travail. Ces ajustements pourraient être pensés dans le cadre de « Politiques temporelles », au service d’une meilleure articulation entre vie privée et vie professionnelle. Ces petits pas pour améliorer le quotidien des familles constitueraient de grands pas pour la vie en société !