Société
Politique et élections
Sexisme et politique: Non ce n’est pas « Madame le Ministre » !
par Mathilde Largepret publié le 31 août 2018
On a tou-te-s entendu parler des célèbres frasques sexistes d’un certain Donald, ou encore de l’agression sexuelle d’un Dominique sur une employée de ménage d’un hôtel de luxe… Nul besoin pourtant de s’éloigner de notre cher royaume pour sentir le sexisme ambiant qui se dégage du monde politique.
« LA PLUS ROSSE... LA PLUS SALOPE…»
"Quand les femmes font de la politique, aux yeux de certains, elles restent des impostrices. A tel point qu’ils se permettent parfois les pires bassesses pour les faire flancher".Voilà ce qu’a déclaré publiquement un politicien carolo à propos d’une adversaire politique, il y a quelques mois. Quand les femmes font de la politique, aux yeux de certains, elles restent des impostrices. A tel point qu’ils se permettent parfois les pires bassesses pour les faire flancher. Dès le départ, le parcours est semé d’embuches. Certaines listes recrutent des femmes uniquement pour répondre aux quotas nécessaires mais leur laissent une place marginale. Une fois élues, le combat n’est pas terminé. Les portefeuilles liés à leurs compétences sont moindres, on continue à leur confier des responsabilités dites « féminines » (enfance, éducation, santé…) et le fameux plafond de verre les empêche d’assurer les plus hautes fonctions, encore et toujours aux mains des hommes.
"FAUT EN AVOIR POUR FAIRE DE LA POLITIQUE"
La société patriarcale, faite par et pour les hommes, remet également en cause la légitimité des femmes à s’engager en politique. Eh oui, à croire ce qu’un homme « qui en a » a rétorqué à une ex-ministre des transports, les attributs génitaux masculins fournissent de facto une expertise en politique. Les femmes, elles, ont tout à prouver. Pas facile quand leur prise de parole est limitée : on les entend moins mais surtout on les écoute moins. Mathilde Larrère, co-autrice du livre Des intrus en politique, explique que cette invisibilité se traduit de manière insidieuse : des femmes politiques « racontent que certains collègues masculins font comme si elles n’étaient pas là, ne les invitent pas à des réunions… ». Et, cerise sur le gâteau, comme si les femmes compétentes n’existaient pas, on les soupçonne parfois d’en être arrivées là grâce à une « promotion canapé » ou d’avoir été pistonnées.
Pour aller plus loin :La femme invisible. Sur l’imaginaire du pouvoir politiqueAnalyse FPS – Femmes politiques et médias
Sexisme ordinaire à l'Assemblée: «Les femmes politiques sont souvent invisibilisées»
« QUAND ON A DES ENFANTS, ON NE FAIT PAS DE POLITIQUE »
"Quand on sait qu’aujourd’hui encore, les femmes consacrent plus de temps que les hommes aux tâches domestiques et ont moins de temps de loisir, on comprend que mener une carrière politique constitue un défi permanent".
©Dans Mon tiroir pour Femmes Plurielles - "Pas de démocratie sans parité"
Concilier vie privée et vie professionnelle, un casse-tête qui a valu à une conseillère communale du Namurois cette réplique cinglante de la part de « son » bourgmestre. Comme le dénonce la tribune rédigée par des femmes politiques françaises, « le rythme de la vie politique, très chronophage, s’est installé loin de toute prise en compte de la part dite privée de nos vies». Quand on sait qu’aujourd’hui encore, les femmes consacrent plus de temps que les hommes aux tâches domestiques et ont moins de temps de loisir, on comprend que mener une carrière politique constitue un défi permanent.
« JE LA VEUX BIEN DANS MON LIT, MAIS PAS EN POLITIQUE »
Faire des commentaires sur le physique d’une femme politique, rien de tel pour tenter d’effacer son professionnalisme et lui montrer que sa place n’est pas ici.Une remarque à caractère sexuel de la part d’un « collègue » ? C’est le lot de nombreuses politiciennes, comme l’actuelle présidente du Sénat qui en a fait les frais en ces termes. Faire des commentaires sur le physique d’une femme politique, rien de tel pour tenter d’effacer son professionnalisme et lui montrer que sa place n’est pas ici. En effet, cela reste encore un territoire fort masculin, où le pouvoir et la domination, même entre hommes, sont omniprésents. A l’image du reste de la société, le sexisme s’y manifeste au quotidien. Pour s’imposer, et parce que se faire sans cesse apostropher fatigue, certaines femmes décident d’utiliser les codes masculins (vêtements, voix, attitude…). Elles se voient parfois contraintes à des arrangements, comme adapter leurs déplacements ou horaires pour éviter d’être confrontée à un élu réputé machiste ou aux comportements déplacés.
Pour aller plus loin :Exécutif espagnol: parité dépassée. La Belgique à la traîne en Europe - Safia KessasHarcèlement sexuel: en politique aussi, la parole se libère - L'Obs
« IL NE S’AGISSAIT DE RIEN DE PLUS QUE D’UNE MAUVAISE BLAGUE »
Minimiser une remarque sexiste comme l’a fait un politicien suite à un sms déplacé envoyé à une femme politique en séance parlementaire, cela fait partie de ce qu’on appelle la « double peine » : en plus d’être victimes de harcèlement et d’agressions, les femmes subissent des répercussions lorsqu’elles les dénoncent. « Dans la majorité des cas, les femmes (…) perdent de facto leur fonction » en rapportant les faits. D’autres n’ont plus l’énergie de rester dans ce monde-là et se retirent de la vie politique.
C’est dans ce contexte que les mesures pour la parité et les quotas prennent tout leur sens. Elles permettent une représentation plus équitable des femmes et des hommes et font diminuer les comportements sexistes. De plus, ces leviers veillent à rééquilibrer une situation inégalitaire qui dure depuis des siècles. Il est temps d’agir pour que les femmes ne soient plus considérées comme une minorité, elles qui constituent tout de même 50,8 % de la population belge.
