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Un toit, mon droit !

Un premier logement ? Pas toujours évident !

par Sophie Vandemaele (Latitude Jeunes) publié le 1 décembre 2017 ©Aleutie - Shutterstock target="_blank"

En tant que jeune adulte, trouver un toit, ce n’est pas seulement avoir un endroit où dormir. C’est aussi apprendre à se débrouiller seul-e, savoir prendre soin de soi, se sentir en sécurité, recevoir ses ami-e-s, construire sa vie… Comment expliquer, aujourd’hui, que tou-te-s les jeunes (et moins jeunes) n’y aient pas accès ? Et surtout vers quelles solutions peut-on se tourner si on veut prendre son indépendance ?

La plupart des jeunes quittent le foyer familial quand ils/elles deviennent financièrement autonomes. Mais aujourd’hui, avec la crise, il est difficile de trouver un contrat à durée indéterminée (CDI), ce qui retarde l’âge du départ de la maison. Accéder au premier logement coûte cher. Il faut débloquer les fonds pour une garantie locative (ou les frais de notaire dans le cas d’un achat), avoir l’argent pour acquérir l’équipement de base, gagner suffisamment pour payer le loyer et la facture énergétique… En bref, avoir un contrat de travail, un peu d’argent de côté et des parents prêts à se porter garants, c’est toujours l’idéal.

"Le marché privé de l’immobilier est frileux face à ces jeunes qui ne présentent pas assez de garanties."

Malheureusement, ce n’est pas toujours possible. Tou-te-s les jeunes ne bénéficient pas d’un soutien familial : décès des parents, rupture ou mésentente familiale, famille dans l’incapacité de soutenir financièrement leur enfant… Ils/elles ne sont pas tou-te-s égaux non plus dans la course à l’emploi. Décrocher un contrat de travail stable avec un salaire décent reste plus accessible à celles et ceux qui bénéficient d’une formation. Par conséquent, pour certain-e-s jeunes sans travail et sans appui familial, chercher un toit peut vite se transformer en galère ! Le marché privé de l’immobilier est frileux face à ces jeunes qui ne présentent pas assez de garanties. Sans parler des loyers qui sont souvent excessifs, surtout dans les grandes villes. Certain-e-s jeunes doivent alors parfois se tourner vers des logements insalubres loués bien trop chers. Plus inquiétant, le rapport bruxellois sur l’état de pauvreté de 2012 pointe une évolution du nombre de SDF chez les jeunes (environ 16,8 % des personnes enregistrées en centre d’accueil à Bruxelles ont entre 18 et 24 ans). Quant à l’accès à la propriété, les banques prêtent plus facilement aux couples qui ont deux CDI et un apport financier sérieux qu’aux jeunes isolé-e-s sans revenu stable.

QUE FAIRE ALORS ?

"Il faut s’armer de patience car la demande est plus grande que l’offre et les délais d’attente sont souvent importants."

Si l’on désire acheter, les régions wallonne et bruxelloise offrent des aides aux jeunes qui souhaitent devenir propriétaires. Ces aides, qui ont le mérite d’exister, restent néanmoins insuffisantes pour permettre l’accès à la propriété au plus grand nombre. Pour les locations, se tourner vers les sociétés du logement du service public et/ou les agences immobilières sociales reste une option. Toutefois, il faut s’armer de patience car la demande est plus grande que l’offre et les délais d’attente sont souvent importants. Restent les solutions alternatives comme la colocation, qui rencontre beaucoup de succès chez les moins de 30 ans. Cette nouvelle forme de logement offre plusieurs avantages : économiques d’abord, en permettant de partager les frais. Relationnels ensuite, car quand la colocation se passe bien, elle permet de tisser du lien, de ne pas se retrouver isolé-e dans un nouvel environnement et face à ses nouvelles responsabilités. Une autre formule, moins courante, est celle du « logement Kangourou » : il s’agit de partager une partie de l’habitation d’une personne âgée pour un loyer modéré. Chacun garde son espace privé, on se rend des services et on n’est pas seul-e.

©Unsplash

Attention toutefois, ces solutions alternatives ne sont pas adaptées à toutes les situations. Une personne qui bénéficie d’un revenu de remplacement (allocations d’insertion, de chômage, indemnités d’invalidité, pension…) peut voir celui-ci diminuer car elle passe du statut d’isolé à celui de cohabitant. Aux yeux de la loi, on devient cohabitant dès que l’on vit sous le même toit que quelqu’un et que l’on partage des frais. Toutefois, comme commence à le montrer la jurisprudence, un-e colocataire peut être considéré comme isolé-e s’il/elle prouve qu’il/elle ne partage pas les frais du ménage avec les autres colocataires. Si l’on veut constituer un dossier, voici quelques documents à conserver : des factures et extraits de compte prouvant le paiement séparé des aliments, des loisirs, des taxes… ; des photos montrant qu’il existe des espaces de vie privés dans l’habitation ; une déclaration d’absence de projet de vie commune signée par les colocataires… Quoiqu’il en soit, avant de se lancer dans une colocation, il est indispensable de se renseigner auprès de son syndicat et/ou de l’institution qui calcule le montant du revenu pour éviter les mauvaises surprises ! Face à ces réalités, si l’on veut faciliter l’accès à un logement décent pour tous, il importe que les pouvoirs publics prennent des mesures efficaces, par exemple en individualisant les droits sociaux pour supprimer le statut de cohabitant et faciliter la colocation; en augmentant les offres de logements sociaux et les agences immobilières sociales ; en encadrant les loyers pour éviter les abus… Ces mesures permettraient que cet accès au logement devienne un bouclier contre la précarité plutôt qu’une forme supplémentaire d’exclusion sociale !

Pour aller plus loin :Recherche de logement à louer : quelques conseilsLa plateforme "Un toit mon droit" Tags : logement