Culture
Environnement
Neuf femmes engagées dans l’écologie
par Romane Schyns publié le 8 mars 2018
Alors que certain-e-s font des efforts quotidiens pour participer au bien-être de la planète et de ses habitant-e-s, d’autres y consacrent leur vie entière et se battent quotidiennement pour faire valoir leurs droits ainsi que l’importance de la protection de leurs terres, de leur travail, de leurs agricultures. Parmi ces personnes, des femmes venues des quatre coins du monde sont devenues des emblèmes de la lutte environnementale. Nous vous proposons de découvrir neuf d’entre elles.
RUTH BUENDIA - La gardienne des Indigènes (1977 – aujourd’hui)
« C’est notre peuple, c’est nous qui savons ce qui est bon pour lui, pas les autres ».Le long du fleuve Ene, au Pérou, Ruth Buendia vit ses premières années. Après une violente révolution qui cause la mort de son père, elle est contrainte de rejoindre la capitale avec sa mère. Des années plus tard, elle arrive à la tête de l’association C.A.R.E (Centrale Ashaninka du fleuve Ene), qui lutte pour défendre les indigènes, en les accompagnant dans les problèmes qu’ils/elles peuvent rencontrer dans la société moderne (l’obtention d’une carte d’identité, par exemple). Avec le temps, sa voix prend plus d’importance et elle devient cheffe de la microsociété des Ashaninka, là où elle a grandi. Lorsque le gouvernement de son pays lance le projet de construire une centrale hydraulique, le long du fleuve Ene, forçant des centaines d’habitant-e-s à déménager, elle remue ciel et terre pour les défendre. Le projet n’est pas annulé, mais elle obtient sa suspension. C’est une victoire, qui lui a valu le Prix Goldman de l’Environnement, en 2014. Aujourd’hui, elle continue à se battre pour le bien de son peuple.
Pour aller plus loin :La voix des sans voixLes AshaninkaWANGARI MAATHAI - Celle qui plantait des arbres (1940-2011)
« Chaque arbre est le symbole vivant de la paix et de l’espoir. »En Afrique, plus particulièrement au Kenya, cela fait plusieurs années que les femmes sont invitées à planter des arbres autour de leurs villes et villages. Cette initiative est née du Mouvement de la Ceinture Verte, fondé par Wangari Maathai, en 1977. Cette militante a passé sa vie à se battre pour la biodiversité de son pays, la création d’emploi pour les femmes et la lutte contre la déforestation. Elle fut un modèle pour les femmes du continent en devenant la première femme d’Afrique de l’Est et d’Afrique centrale à obtenir un doctorat, ainsi que la première femme africaine à recevoir un Prix Nobel de la paix, prix qui récompense son militantisme actif pour le bien de son pays.
Pour aller plus loin :BiographieArticle du journal LeMondeVANDANA SHIVA - La rebelle de l’OGM (1952 – aujourd’hui)
« Sous le masque de la croissance se dissimule, en fait, la création de la pénurie. »En Inde, dans les années 70, un mouvement est né, sous le nom de Chipko : il regroupait des femmes qui s’opposaient à la coupe d’hectares de forêt en créant, avec leur corps, un rempart entre l’arbre et la hache. C’était un combat pour leur survie, mais également pour celle de leur habitat et leur agriculture, qui se désagrégeaient sous leurs yeux. Des années plus tard, toujours en Inde, une femme, Vandana Shiva, se présente comme l’héritière de Chipko. Les terres continuant à disparaitre face à l’industrie agrochimique, elle lutte pour une agriculture paysanne et, surtout, biologique. Ecoféministe, elle est la créatrice du programme Navdanya, qui a permis à 10.000 fermiers/ières de s’approprier les méthodes de culture biologique, via des formations, la collecte et la conservation de nombreuses variétés de graines.
AMEENAH GURIB-FAKIM - Madame la Présidente (1959 – aujourd’hui)
« Nous ne réalisons pas à quel point nos ressources sont précieuses. Et à travers notre insouciance, nous continuons de les détruire. »Sur l’île Maurice, dans les années 60, une petite fille nommée Ameenah grandit avec une fascination pour les plantes, leur diversité et leurs propriétés. Avec le temps, cette passion se transforme en combat et Ameenah commence à militer activement pour le bien de la biodiversité du continent africain. En 2015, en plus de son combat pour l’écosystème, elle devient la toute première femme à être élue présidente de l’île Maurice. La même année, elle participe à la COP21, pour discuter des effets désastreux des gaz à effet de serre sur les variétés de plantes qu’elle a passé sa vie à étudier. Elle se bat tous les jours pour que chaque pays réalise que notre survie dépend de l’environnement et participe ainsi à sa protection.
Pour aller plus loin :Son discours COP21 (anglais et français)DIAN, BILLIE ET CAROL - Les créatrices d’Oregon Women’s Land
« [C’est un endroit] où les femmes ont, ensemble, partagé du travail et des compétences ; où les femmes sont venues guérir et grandir ; où les femmes sont venues pour ne faire qu’une avec la Terre Mère »(Oregon Women's land trust)
En Oregon, au milieu des années 70, un groupe de lesbiennes suit l’idée de trois femmes, Billie, Dian et Carol, et fait l’acquisition d’un petit morceau de terre. Sur cette terre, elles ont l’espoir de construire une communauté à l’idéologie utopiste, loin de la société patriarcale, industrielle et homophobe dans laquelle elles se sentent piégées. Leur projet part de rien, mais ces femmes réussissent, au bout de plusieurs années de travail, à construire une micro-société où chacune est invitée à se réinventer, à trouver sa place dans le monde. Si ce Women’s Land, renommé OWL’s Farm, a aujourd’hui du mal à survivre, principalement menacé par les communautés catholiques des alentours qui se battent pour sa disparition, il reste un lieu d’accueil et de vie pour chaque femme. Les habitantes y vivent une vie paisible, à base de collectivité, de travail de la terre et de féminisme, loin de la société urbaine et capitaliste occidentale.
TEMPLE GRANDIN - La voix des animaux (1947 – aujourd’hui)
« La nature est cruelle, mais nous n’avons pas à l’être »Petite fille déjà, Temple est différente des autres enfants de son âge. Elle ne parle pas, ne sourit pas et ne semble pas comprendre les interactions sociales. Elle est âgée de 3 ans, lorsque les médecins comprennent qu’elle est porteuse d’autisme. En grandissant, Temple apprend à en faire sa force. Elle qui semblait incapable d’interagir avec les autres humains s’est découverte une capacité extraordinaire de compréhension des animaux, plus particulièrement du bétail. Petit à petit, elle met cet atout au service du bien-être animal d’abord aux États-Unis, puis partout dans le monde. Ainsi, elle instaure des conventions générales sur l’élevage et l’abattage, afin que cela soit bénéfique pour la viande, mais surtout, pour l’animal. Aujourd’hui encore, elle réalise de nombreuses conférences et participe activement à ce combat.
Pour aller plus loin :Temple Gradin vue par les CulottéesSTARHAWK - La sorcière des temps modernes (1951 – aujourd’hui)
"Partie prenante de ce changement, la persécution des sorcières était liée à trois processus enchevêtrés : l'expropriation de la terre et des ressources naturelles, l'expropriation du savoir, et la guerre contre la conscience de l'immanence, inhérente aux femmes, à la sexualité et à la magie."Aux États-Unis, une voix s’élève parmi les activistes altermondialistes, les féministes, les antinucléaires… Cette voix, c’est celle de Starhawk, sorcière des temps modernes, militante au quotidien. Pionnière de l’écoféminisme, elle a notamment participé à des rituels dans le but de protester contre des installations nucléaires. Écrivaine écoféministe néo-païenne, elle cherche à permettre à toutes les femmes, à travers ses livres et formations, de prendre conscience de leur pouvoir, de leur force spirituelle, et de l’énergie de la nature. Réunies, ces forces leur permettraient d’être en accord avec elles-mêmes, mais également de se battre pour la collectivité, le bien de tous et la préservation de l’environnement.
Pour aller plus loin :Starhawk et les nouvelles sorcièresLa fierté d'être une sorcière